4. Une mission top-secrète pas si secrète

Le soleil du début d’après-midi avait dégelé les pavés et de nombreuses personnes profitaient désormais des rues mais Liwen ne leur prêtait aucune attention. Elle avançait d’un pas déterminé vers le palais en songeant à ce qui allait se passer. Elle savait que ce qu’elle allait apprendre à cette réunion allait changer ses plans pour les mois à venir. L’Empereur ne l’avait jamais convoqué personnellement. Bien qu’elle sache pertinemment que c’était probablement un de ses proches conseiller qui l’avait fait mandé au nom de Sil’Afian, elle ne pouvait s’empêcher de s’enorgueillir d’une telle demande. Celle qui avait quitté les Frontaliers, celle dont le nom avait été un moment synonyme de trahison et de lâcheté, était désormais appelée pour une mission secrète.

Un léger sourire flotta sur ses lèvres. Elle avait parcouru un sacré chemin depuis son départ et avait sacrifié beaucoup de choses.

Ses pensées se tournèrent vers Welyn et son sourire disparut rapidement. Elle avait de nouveau laissé la garde de la jeune fille à quelqu’un d’autre. Elle l’avait quitté avec un bref “à bientôt” alors qu’au fond d’elle, elle n’avait aucune certitude de quand elles se reverraient, ni même si elles se reverraient. Mais Liwen avait toujours fonctionné ainsi. Cela lui venait certainement de son éducation de Frontalière. Elle partait sans trop rien dire à Welyn, pour ne pas l’inquiéter et aussi parce qu’au fond d’elle, leurs multiples séparations lui faisaient bien plus mal qu’elle ne voulait l’admettre. Elle tenta de se rassurer en se disant qu’avec Damos, Welyn était en sécurité. En plus elle adorait Maëlle. Il n’y avait aucune raison de s’inquiéter pour elle, n’est ce pas ?

Liwen ne remarqua pas le bouton de rose qui fleurissait entre deux pavés en plein hiver, trop occupée à lancer un regard suspicieux à un poignée de personnes qui s'agglutinaient bruyamment devant un un pan de mur fissuré. Elle ne prit pas le temps de s’y intéresser plus et continua son chemin vers le palais. Elle était partie en avance pour parer à toute éventualité comme à son habitude mais elle n’avait pas de temps à perdre avec un groupe de badauds.

- Liwen Til’Galiwen, j’ai été conviée par l’Empereur.

Le garde ne jeta même pas un coup d'œil à la missive qu’elle lui tendait et l’invita à la suivre. Quand elle entra dans la salle où la réunion aurait lieu, un groupe d'hommes et de femmes la toisa de haut en bas. Elle les scruta d’un rapide coup d'œil avant de les saluer d’un signe de tête.

Des Frontaliers.

Ils avaient beau ne pas arborer leurs armures, tout dans leur attitude le clamait pour qui connaissait leurs coutumes et Liwen avait grandi parmi eux. Bien qu’elle ait quitté la Citadelle depuis plusieurs années, elle reconnut Elzeir et comprit pourquoi elle faisait partie de cette mission. Elle n’était pas là pour ses talents d’escrime et encore pour ses talents tactiques. Il y avait des personnes bien plus douées qu’elle dans cette pièce. Par contre, elle était certainement la plus à même à conseiller le groupe en matière de discrétion. Et pour cela, elle serait épaulée par le marchombre qui pour le moment restait dans l’ombre, adossé à un pilier au fond de la salle. Elle avait souvent travaillé avec ce genre de personnage et elle savait très bien qu’Elzeir ne fierait jamais à un marchombre aussi bon soit-il.

La jeune femme se retint de soupirer en voyant les deux dernières personnes les rejoindre. Un rêveur et un dessinateur. Elle n’aimait pas du tout le rôle qu’elle allait devoir endosser. Elzeir serait à la tête du groupe et elle devrait faire en sorte que cet homme, qui avait toujours dirigé des Frontaliers, soit capable de s’adapter une assemblée disparate. Mais d’après le regard de dédain qu’il lui avait lancé, il faisait partie des personnes qui la considérait toujours comme une traître qui avait trahi la Citadelle.

La porte de l’autre côté de la salle s’ouvrit sur l’Empereur Sil’Afian et tout l’assemblée se courba à son entrée.

- Bienvenue mes amis. Nous avons l’honneur d’accueillir Dame Aubépine qui va pouvoir se joindre à vous pour réaliser la mission que je vais vous confier.

Il fit un geste de la main vers la femme qui l’accompagnait. Elle était à peine plus vieille que Liwen et arborait un grand sourire qui tranchait avec l’atmosphère tendue qui régnait dans la pièce jusqu’à leur arrivée.

- Je serais ravie de me joindre à vous pour anéantir définitivement ces fichus Mercenaires du Chaos.

Des murmures s’élevèrent dans la salle face à cette révélation. Ainsi ils restaient des Mercenaires…